Suivi des avancées

9e Comité de Pilotage Opérationnel

29 juin 2022

La 9ème réunion du Comité de Pilotage Opérationnel (CPO) de l’Alliance Sahel, a eu lieu à Bonn le 24 juin 2022. La rencontre s’est centrée sur les dynamiques d’action en cours sur le terrain dans les pays du G5 Sahel, ainsi que sur les questions liées à la crise alimentaire.  Lors de cette réunion présidée par l’Allemagne, et qui a réuni plus de 60 participants, les plus récents développements affectant le Sahel ont également été discutés.

 

Bonn – le 24 juin 2022 – Christoph Rauh, Directeur Afrique du ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ), a d’emblée évoqué les préoccupations grandissantes pour la situation au Sahel « Mes pensées vont aux personnes touchées par les dernières attaques au Burkina Faso, au Mali et au Niger, au cours desquelles tant de personnes ont perdu la vie ou ont dû fuir la violence et quitter leur foyer. Ces attaques nous rappellent que nous sommes confrontés à des défis transfrontaliers dans la région du Sahel. Je suis préoccupé par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a un impact fort sur le Sahel. Alors que la guerre a lieu loin du Sahel, ses implications sur la sécurité alimentaire dans la région sont importantes: six pays Ouest Africain importent plus de 30% de leur blé d’Ukraine et de Russie.»

Eric Tiare, Secrétaire Exécutif du G5 Sahel a également évoqué le contexte dégradé dans la région « Le présent CPO se tient à un moment critique de la vie du G5 Sahel caractérisée par la nette dégradation de la situation sécuritaire dans le Fuseau centre, notamment, rendant quasi impossible la mise en œuvre des projets de développement et un contexte politique préoccupant marqué par l’annonce du retrait du Mali de l’organisation. Ce retrait a naturellement des conséquences sur l’architecture institutionnelle du G5 Sahel. »

Maman Sidikou (Union Africaine)

Lors de son intervention, Maman Sidikou, Haut représentant de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel, a souligné pour sa part que « Nous avons une crise de la gouvernance marquée par un recul démocratique dans certains pays et une gestion de la chose publique régulièrement décriée. L’insécurité est grandissante et le terrorisme se propage dans la région avec des tueries quasi-quotidiennes et une crise humanitaire sans précédent. La coopération régionale et les partenariats sont mis à rude épreuve dans la région, au moment même où l’action collective est plus que jamais nécessaire. »

 

 

 

Focus sur l’opérationnalisation de l’Alliance dans les pays du G5

Andreas Hartmann, Allemagne, Porte-Parole au Mali

Afin de mieux comprendre les activités de l’Alliance Sahel sur le terrain, des experts ont placé l’accent sur la mise en œuvre de l’ATI dans le contexte particulier de la crise au Mali et sur les principales mesures prises, ainsi que sur les principaux enseignements de l’atelier de Bamako. L’analyse des défis réalisée lors de cette rencontre de Bamako ont été rappelé en séance : défis liés à l’insécurité ; défis liés à l’instabilité institutionnelle et une faible présence de l’État; difficultés en termes de gestion finances, passations de marché, audit, etc ; impacts des sanctions de la CEDEAO. La discussion a permis de mettre en lumière plusieurs pistes de solutions pour chacun des défis.

La séquence sur l’opérationnalisation terrain a été également l’opportunité de faire le point sur l’Etat d’avancement de la facilité G5 Sahel, cette facilité multi-bailleurs visant le financement rapide de projets de développement dans les zones sensibles. A ce jour, la Facilité, d’une contribution initiale de l’Allemagne de 50 millions d’euros, sera également financée par la France. Un premier appel à propositions a été lancé en Mauritanie et la préparation des appels au Burkina Faso et au Tchad est en cours.

Vue d’ensemble des travaux du 9eme CPO

40 millions de personnes vulnérables à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle

Après une séquence sur Fonds commun sectoriel éducation au Niger, les échanges de l’après-midi se sont centrés sur la crise alimentaire dans les pays du G5. Comment agir sur les causes structurelles et mieux articuler les interventions humanitaires et de développement?

Christoph Rauh a rappelé que « Le Tchad a déjà officiellement déclaré l’état d’urgence alimentaire. Globalement, la guerre [en Ukraine] pourrait entraîner l’insécurité alimentaire de 10 millions de personnes supplémentaires au Sahel.  Cette guerre ne fait qu’aggraver une crise au Sahel qui avait déjà vu l’insécurité alimentaire dans la région augmenter à un rythme alarmant pour atteindre, ces dernières années, plus de 27 millions de personnes touchées. Il est donc primordial que nous nous attaquions à ce problème de manière adéquate et énergique. La discussion du panel d’aujourd’hui peut être un tremplin pour notre compréhension de la manière dont nous pouvons contribuer à contenir cette catastrophe humanitaire qui s’aggrave.»

Djime Adoum a parlé de la crise alimentaire comme d’un “autre challenge pour la sécurité humaine. Les deux fournisseurs principaux de céréales pour la région du Sahel sont la Russie et l’Ukraine. Les pays du Sahel important 55% de leurs denrées alimentaires. 20 millions de Sahéliens sur 80 dépendent de l’aide internationale et ce chiffre ne fait qu’augmenter »

Intervention d’Ollo Sib sur l’impact des crises sur les questions alimentaires

Ollo Sib, Conseiller régional principal en recherche, évaluation et suivi au Programme alimentaire mondial (PAM), a établi lors de son intervention le diagnostic des impacts des crises. « Dans les zones fragiles, nous assistons à l’augmentation des déplacements forcés et prolongés et les conditions d’un retour durable ne sont pas remplies. Ces déplacements amènent des risques de protection accrus (violence sexuelle, recrutement d’enfants soldats, mécanismes d’adaptation négatifs, etc.). Par ailleurs, les crises en cours perturbent l’accès aux services sociaux, avec un bouleversement notoire des systèmes de santé et la fermeture de trop nombreuses écoles ».

Source: PAM

Après le diagnostic des crises, Ollo Sib a abordé l’approche nexus qui, pour le PAM, implique que les résultats de l’humanitaire, du développement et de la paix se complètent et contribuent les uns aux autres.

M. Aboubacar Djimraou, Conseiller technique à l’initiative 3N

«La séquence sur l’alimentation a été marqué par l’intervention de M. Aboubacar Djimraou, Conseiller technique à l’initiative 3N (Les Nigériens Nourrissent les Nigériens) qui a pu partager sa connaissance approfondie de la région. « Le secteur Sécurité alimentaire et nutritionnelle et développement agricole durable occupe 80% de la population au Niger, dans un pays essentiellement rural et où la majorité des pauvres sont ruraux et sont des femmes. Des défis complexes persistants, multiformes reposent sur une combinaison de causes structurelles, conjoncturelles et émergentes. 2021/2022 voit une conjonction de facteurs défavorables : mauvaise campagne 2021, effets de l’insécurité civile, covid, effets plus récents de la crise en Ukraine avec la pression inflationniste généralisée. Au Niger, la campagne agricole 2021 a été marquée à une baisse de production de 40% par rapport à la moyenne quinquennal. A cela s’ajoutent de nombreux facteurs aggravants… 4,4 millions de personnes sont identifiées comme vulnérables à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle en période de soudure 2022 au Niger. Au niveau régional, environ 40 millions de personnes sont concernées, ce qui constitue un niveau inédit. D’autres difficultés structurelles sont liées aux conditions de vie dans les zones pastorales et agropastorales affectées de plein fouet par les effets du changement climatique, les difficultés d’accès aux services sociaux de base et des modes de gouvernance locale insuffisamment inclusifs. Ces zones tendent ainsi à offrir le terreau favorable au développement des groupes armés terroristes vivant sur des crimes et des délits de toutes sortes. »

Dr Robert Guantoueu Guei

Par la suite, le Dr Robert Guantoueu Guei, Coordonnateur Sous-régional de la FAO, a partagé les recommandations du Groupe de Coordination «Agriculture, Développement rural et Sécurité alimentaire». Parmi les conseils du groupe pour la sortie de crise, le Dr Guei a évoqué l’appui aux pays du G5 dans les interventions d´anticipation et de préparation aux urgences; le renforcement des réformes sectorielles s’attaquant aux causes structurelles de la crise alimentaire; le renforcement de la résilience des populations les plus vulnérables aux changements climatiques et le soutien aux mécanismes de solidarité régionale tel que ceux mis en place par le G5, CEDEAO et le CILSS.

Gouvernance de l’Alliance : la Banque mondiale assumera la présidence CPO

Le bon fonctionnement de l’Architecture de l’Alliance pour le Sahel était à l’ordre du jour de la dernière séquence, à travers notamment la rotation des tâches de gouvernance. La Banque Mondiale a annoncé sa volonté d’assurer la présidence du Comité de Pilotage Opérationnel de l’Alliance, à la suite de l’Allemagne. Décision validée par les membres.

Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale, a déclaré que « L’engagement [pour le Sahel] est très clair, les défis sont évidents. Ensemble, nous pouvons rendre les choses possibles.  La Banque mondiale est prête à prendre les devants ». Le prochain comité de pilotage de l’Alliance Sahel devrait se tenir à l’automne prochain.


*Le Comité de Pilotage Opérationnel (CPO), se tient deux à trois fois par an. Cet organe dirige les priorités, les activités et l’agenda de l’Alliance au niveau opérationnel.  Ces comités sont présidés par l’Allemagne, en la personne du Directeur Afrique du ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ), M. Christophe Rauh.

 

Source : Alliance Sahel